Marcel Cremer, le Théâtre AGORA et la Communauté germanophone de Belgique par son éditeur, Emile Lansman

 

« [Marcel Cremer] c’est un créateur qui étonne, qui ne craint pas de nous remuer mais pour allumer en nous des braises d’émotions dont la lueur se prolonge hors des salles obscures. » Le Ligeur (Belgique)

Marcel CremerLa Belgique compte, officiellement, trois Communautés ayant leur propre parlement et leur propre gouvernement : la Communauté flamande, la Communauté française (appelé aujourd'hui Fédération Wallonie-Bruxelles) et la Communauté germanophone forte d'un peu plus de 70.000 habitants. Cette dernière regroupe un ensemble de petites villes sur un territoire qui a changé de nationalité plusieurs fois au gré des conflits armés, notamment au cours des deux dernières guerres mondiales.

C'est dans cette région (et plus précisément à Saint-Vith) qu'en 1980, en compagnie d'une trentaine d'autres jeunes, le metteur en scène et auteur belge Marcel Cremer (1955) a fondé - selon la "légende" sur un terrain de football mal entretenu - le Théâtre AGORA.

Saint-Vith est situé dans une région rurale de collines, aux confins de l'Eifel, à proximité des frontières allemande et luxembourgeoise. Au fil de l'Histoire, Saint-Vith et sa région ont été à plusieurs reprises un champ de bataille. Ainsi, tandis que les hommes valides étaient enrôlés dans l'armée allemande, la ville a été complètement anéantie par les bombes alliées à Noël 1944.

Les mises en scène du Théâtre AGORA ont longtemps porté (et portent encore mais de manière plus discrète) les traces de l'Histoire en laissant transparaître le thème prégnant de la quête d'identité. Pratiquement toutes les pièces ont été jouées en allemand et en français.

Marcel Cremer s'est progressivement imposé, tant au plan national qu'international, par son travail au sein d'AGORA et à travers ses mises en scène avec d'autres théâtres ou ses ateliers théâtraux. Par sa façon très personnelle de générer les spectacles avec l'équipe au grand complet, il a mis au point une méthode qu'il a baptisée "théâtre autobiographique". Elle consiste à tenter d'extirper de chaque intervenant dans la conception d'un spectacle ce qu'il porte au plus profond de lui en rapport avec le projet. Quitte à réveiller, par un travail d'accouchement alternant les séquences individuelles et collectives, des blessures mal cicatrisées ou quelques traumatismes enfouis. Ainsi, Marcel Cremer n'hésitait pas à envahir les cimetières pour inviter les comédiens à révéler leurs secrets, fantasmes et autres pulsions aux habitants des lieux dont chacun était au moins certain de la discrétion.

Après avoir longtemps hésité - il n'était pas persuadé de l'intérêt intrinsèque de ses textes conçus dans des contextes très particuliers -, Marcel Cremer a finalement souhaité, pour les trente ans de la compagnie, voir neuf de ses pièces publiées en français dans un recueil. Il est mort en décembre 2009, quelques mois après leur publication, sans se douter que 4 ans plus tard, l'une de ses œuvres favorites, La femme corbeau, serait recréée à Montréal.

Tous ceux qui l'ont bien connu ont regretté la perte d'un créateur de théâtre original et fécond, mais aussi d'un compagnon singulier et attachant qui avait su créer une véritable famille artistique autour de lui.

Son éditeur, Emile Lansman

 

« Les oiseaux libres volent »

rencontre autour de l’œuvre de Marcel Cremer


Le 29 octobre 2013, l'événement « Les oiseaux libres volent » a été organisé dans la conviavialité du bar du théâtre Prospero, grâce au soutien de l'éditeur belge, Emile Lansman (EMILE&CIE).

Dans une discussion animée par Emile Lansman, Rémi Boucher (fondateur et directeur du Festival international Les Coups de Théâtre, Montréal) ainsi que Louise Allaire (directrice artistique et générale des Gros Becs, Québec) ont témoigné de leur affection pour Marcel Cremer et pour son oeuvre. Mélanie Dumont (Directrice artistique associée - volet Enfance/jeunesse, Centre National des Arts, Ottawa) a décrit l'homme de théâtre à travers l'entretien qu'il donna à Lansman en 2009. Milena Buziak (metteure en scène et co-directrice artistique de Voyageurs Immobiles, Cie de création) a décrit sa démarche artistique pour la création de La femme corbeau.

Quatre extraits de textes de Cremer (Le roi sans royaume, Le cheval de bleu, Le chat requin et La femme corbeau) ont été mis en lecture par Milena Buziak et interprétés par Valérie Dumas, Kathleen Aubert et Jean-Philip Debien

La soirée s'est poursuivie autour d'un verre de l'amitié offert par EMILE&CIE dans l'ambiance chaleureuse du bar du théâtre.